La spécificité au cœur du travail de romancier

Aujourd’hui, j’aborde le sujet de la spécificité dans l’écriture de roman.

Dans mon travail de bêta-lectrice, je souligne souvent cet élément.

👉 Soit parce que sa bonne utilisation me plonge immédiatement dans l’histoire.

👉 Soit parce que le manque de spécificité est un obstacle à une expérience de lecture immersive.

Alors, ma mission avec cet article c’est de vous convaincre d’être spécifique !

1. La spécificité, c’est quoi ?

Le concept de spécificité peut se décliner à tous les niveaux : personnages, descriptions des lieux, intrigue. Il consiste à préciser toujours plus ce que l’on raconte ou ce que l’on décrit. L’idée est de faire jaillir un élément précis dans la tête du lecteur.

Beaucoup d’histoires se ressemblent (et c’est normal !) et ce qui les rend spéciales et différentes, ce sont souvent leurs éléments spécifiques qui peuvent venir tout droit des expériences de l’auteur, de son imagination ou alors de recherches approfondies.

Qui fait le travail pour créer l’histoire dans la tête du lecteur ?

Pour moi, il s’agit d’un équilibre à trouver entre le lecteur et le romancier. Par exemple, si votre personnage principal a un problème au travail qui lui fait rater une soirée avec le potentiel amour de sa vie, vous pouvez juste mentionner un « impondérable au travail », ce qui n’est pas spécifique, ou vous pouvez faire l’effort de transformer ces trois mots en quelque chose de précis un « chihuahua à euthanasier ». Dans le premier cas, l’imagination de votre lecteur peut se mettre à vagabonder ou alors, il peut juste ne pas être intéressé plus que ça en fonction du type de personne. Mais dans le deuxième cas, une image précise apparaît dans sa tête, son esprit ne peut pas vraiment vagabonder pour interpréter les mots (il peut toujours vouloir en savoir plus, mais il n’a rien à interpréter) et qu’il soit intéressé ou pas, il a l’information et il peut activer son imagination à partir de ce détail s’il le souhaite.

Être spécifique, ce n’est pas ajouter des mots en plus et noyer votre lecteur avec des informations détaillées et inutiles, c’est transformer les mots trop génériques existants en mots spécifiques à votre histoire, dans la mesure du possible.

Pour cela, vous pouvez :

👉 Vous assurer de faire un travail d’imagination et de visualisation de la scène en amont de l’écriture.

👉 En aval, pendant les révisions, vous pouvez être à l’affût des éléments trop génériques qui pourraient être spécifiés.

2. Trois raisons de vous focaliser sur la spécificité

D’abord, être spécifique, c’est souvent s’éloigner des clichés. En cherchant à préciser même le plus gros cliché, on arrive à quelque chose de personnel. C’est dans le générique et le vague que l’on tombe dans le déjà-vu cent fois. Par exemple, si votre histoire se passe dans une « grande ville », l’image générée dans la tête de votre lectrice est la plus standard possible, peut-être des gratte-ciels étincelants, des rues animées, etc. Mais si vous faites l’effort de préciser quelle ville (ou d’en inventer une) avec des repères très précis, des noms de rues, des personnages-figurants emblématiques qui disent quelque chose du lieu, alors l’image créée est bien différente et surtout beaucoup plus intéressante.

Ensuite, la spécificité, c’est le secret de l’écriture immersive, vous savez, cette sensation d’être aspiré par le roman et d’oublier où l’on est pour un moment ? Les détails précis captent l’attention du lecteur parce qu’ils éveillent sa curiosité. Ils aident à visualiser la scène sans efforts d’imagination trop important. Et c’est pour ça que plus le détail est précis plus ça marche. Vous activez l’imagination du lecteur, mais vous activez aussi ses émotions. Dans la vie, c’est souvent un détail subtil (une étoile fluorescente collée au plafond), un petit geste (faire tourner son alliance sur son annulaire), ou un mot (« Bref ! » qui ponctue chaque phrase) qui en dit beaucoup.

Enfin, la spécificité, ça marche, parce que ça rend les histoires plus crédibles. En effet, dans la vraie vie, on utilise des détails concrets dans une conversation. On nomme les lieux, les gens et les événements. On désigne les choses souvent par des détails qui nous ont marqué (« le café avec les canapés rouges et les grosses ampoules au plafond, là, tu vois ? »).

La crédibilité peut aussi venir de détails sur le secteur d’activité, le fonctionnement général du monde créé dans votre roman, qu’il soit réaliste ou fantastique. Malgré la suspension de l’incrédulité que l’on demande au lecteur, lui donner quelques réponses logiques et précises sur ce que vous lui proposez est utile pour sonner juste.

En conclusion,

Même si la spécificité ne fait pas tout, elle est, à mon avis, l’un des éléments indispensables d’un roman réussi.

Bien sûr, vous pouvez aussi avoir un style minimaliste ou une volonté de rester mystérieux pour des raisons narratives.

L’idée est de rester conscient de cet élément en cours d’écriture et au moment des révisions.

Y a-t-il une bonne raison au manque de spécificité ou alors avez-vous *juste* manqué de motivation, de recherches ou d’inspiration ?