Erreur d’auteurs #5 : la chronologie qui rend fou !
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C’est reparti pour un article de la série #erreurdauteurs !
Aujourd’hui, je me plonge dans la chronologie embrouillée de vos histoires. C’est un problème que je rencontre assez souvent dans mes bêta-lectures.
Parfois, il y a un vrai problème de chronologie, dans le sens où les calculs ne sont pas faits correctement entre l’âge des personnages, l’année de l’histoire et les dates des scènes dans le présent, des flash-backs ou des souvenirs. Dans ce cas-là, il n’y a qu’une chose à faire : une frise chronologique avec vos plus beaux crayons de couleur ou avec Excel !
Dans cet article, je m’intéresse surtout aux récits à la chronologie correcte, mais mal transmise aux lecteurs. Je vous explique l’impression à la lecture, les sources du problème et des pistes de solution.
Photo de RODOLFO BARRETO sur Unsplash
1. L’impression à la lecture d’une chronologie embrouillée
Quand la chronologie n’est pas claire, on revient souvent en arrière dans notre lecture pour comprendre comment on est passé d’une scène à l’autre. Instinctivement, si on n’a pas d’indications, on pense que les scènes se suivent de manière rapprochée, mais on a peut-être remarqué un détail qui vient contredire cela. Par exemple, la météo, la saison, les vêtements, l’évolution d’une situation ou d’une relation, le ressenti d’un personnage qui semble s’être vite remis d’un conflit, d’une rupture ou d’un deuil. On est alors sorti de notre lecture car on se dit que du temps a dû s’écouler sans que l’auteur nous l’ait signalé. Dans ce cas-là, au lieu d’être plongé dans l’histoire, on se questionne sur le détail et sur comment il faut le comprendre.
Un autre type d’impression à la lecture d’une chronologie embrouillée est d’avoir le tournis à cause des allers-retours dans le temps ! Ces allers-retours peuvent prendre plusieurs formes : de longs flash-backs, des souvenirs ou des récits dans des dialogues. Dans ce cas-là, l’auteur demande trop d’efforts au lecteur, qui doit suivre en parallèle plusieurs scènes : le présent et le passé, parfois même plusieurs couches du passé imbriquées !
On peut également avoir des scènes qui ne se suivent pas chronologiquement, avec une scène du passé qui est soudainement insérée sans aucun indice pour le lecteur. A la lecture, je suis perdue, je crois que ça se suit et comme j’ai raté le saut dans le temps (en avant ou en arrière), je trouve la scène incohérente.
Dans tous les cas, la magie est rompue : le lecteur sort de sa lecture.
2. Les sources du problème d’une chronologie qui rend fou
Plusieurs origines peuvent être identifiées pour ce problème qui embrouille l’esprit du lecteur.
Le cas le plus fréquent est celui de l’auteur qui connait la chronologie de son roman et ne pense pas à la partager avec son lecteur, parce qu’à ses yeux, ça coule de source. Et en plus, il trouve que ce ne serait pas très subtil de dire clairement « Le lendemain » etc…
Le deuxième cas est celui de l’auteur qui préfère ne pas faire les calculs des jours qui passent et de la cohérence globale. Pour éviter les erreurs, il ne précise rien et laisse flotter ses personnages dans une temporalité floue. La chronologie peut être correcte (ou pas) et on ne peut rien vérifier. Souvent, c’est le lien de confiance entre auteur et lecteur qui peut être érodé par le doute que cela entraîne.
Dans le troisième cas, l’auteur crée le passé de ses personnages et de son monde en écrivant et il insère toutes ces informations de manière spontanée dans les scènes de son roman, au moment où il les découvre lui-même. Cela crée un ensemble assez confus avec des informations pas forcément pertinentes pour le lecteur, qui peuvent avoir l’air de digressions.
Enfin, dans le dernier cas, il s’agit d’un procédé narratif intentionnel. L’auteur veut laisser planer le mystère et fait volontairement se questionner le lecteur sur le moment de la scène. Par exemple, est-ce que Marie a révélé son secret à Tom avant ou après le mariage de Tom ?
Bien sûr, on peut trouver un mélange de tout ça !
3. Les pistes de solution
Les pistes de solution sont nombreuses, et comme souvent, identifier l’origine du problème aide à le résoudre plus facilement.
👉 Si le problème est seulement de clarifier l’écoulement du temps entre les scènes, alors on peut envisager de mettre le lieu et la date en début de chapitre « Lyon, le 17 novembre 2021 ».
On peut aussi soigner particulièrement les transitions entre les scènes. Par exemple, si votre scène se termine par « Il ne restait plus que 12h avant l’examen qui allait décider du reste de sa vie. », et que la scène suivante commence par « Quand elle s’assit à la table d’examen, sa main tremblante renversa sa bouteille d’eau encore ouverte. », on comprend clairement l’enchaînement.
On peut aussi être plus classique et ajouter des marqueurs de temps. Ils peuvent être directs comme « trois jours plus tard » ou indirects comme « les arbres avaient perdu leurs feuilles ». La clarté prime toujours sur la subtilité !
👉 Dans le cas où les flash-backs et souvenirs sont tellement nombreux que le lecteur s’y perd, on peut se poser plusieurs questions. D’abord, est-ce que l’histoire ne devrait pas tout simplement commencer plus tôt ? Si le lecteur a vraiment besoin de voir toutes ces scènes du passé, peut-être qu’une bonne piste de travail est de les lui donner à voir en direct.
Ensuite, est-ce que tous ces retours dans le passé sont vraiment utiles ? Peut-être que certains éléments ont davantage pour vocation de rester dans vos dossiers de préparation. Que se passe-t-il pour votre histoire si vous les supprimez ? Y a-t-il d’autres moyens plus simples de donner les informations que vous donnez dans ces flash-backs aux lecteurs ?
👉 Enfin, si la confusion de la chronologie est un outil narratif et vous permet de créer du mystère et du suspense, attention, je vous conseille de lire cet article qui explique les risques à jouer avec le lecteur comme cela. C’est possible mais périlleux pour un auteur débutant !
En conclusion,
quelle que soit la raison de la confusion de votre chronologie, c’est un point à regarder de près dans vos séances de réécriture. En effet, rien de tel pour décourager un lecteur qu’un roman qui nécessite de remonter dans la lecture et de prendre des notes pour s’y retrouver !