Comment gérer le contexte socio-politique de votre roman
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J’ai réalisé qu’en bêta-lisant vos romans, je me demandais de plus en plus en quelle année se passait l’histoire. Ce n’est pas une réflexion que je me faisais souvent avant 2020 et je pense que c’est parce que le monde change rapidement depuis quelques années. En effet, le quotidien de 2020 n’avait rien à voir avec celui de 2019 ou celui de 2022 ! Comme je suis à l’affut des incohérences, c’est une question qui revient souvent pour moi.
Ces dernières années, j’ai souvent eu l’impression que les histoires que je bêta-lisais se passaient dans un monde parallèle où le présent n’était pas vraiment le nôtre, même si le roman ne s’inscrivait pas explicitement dans l’imaginaire ou l’utopie. Mon hypothèse est que l’auteur a commencé à écrire avant 2020 et a terminé son roman quelques années plus tard.
Alors je me demande s’il faut prendre en compte les masques, les confinements, l’inflation et l’horreur des guerres qui nous entourent dans tous les romans qui se passent dans les années 2020 ? Faut-il mentionner l’année dans laquelle se passe l’histoire ? Peut-on juste ignorer tout ça et faire évoluer les personnages dans un monde un peu générique ou idéalisé ?
J’ai choisi deux éléments comme base de ma réflexion, le thème et le genre. Puis, je vous présenterai l’état de mes réflexions !
1. Le thème d’un roman, un élément pertinent pour travailler le contexte ?
Si votre thème n’a rien à voir avec des thèmes sociétaux et politiques, peut-être que vous n’avez jamais vraiment pensé que les événements nationaux ou mondiaux pourraient avoir une place dans votre roman. Ou bien peut-être que vous voulez que votre histoire soit intemporelle et vous ignorez sciemment le contexte socio-politique.
En effet, certains romans peuvent avoir pour thème précisemment un élément du contexte socio-politique. Par exemple, je viens de terminer Le Silence, de Dennis Lehane, qui se passe à Boston en 1974 et qui nous plonge dans les conflits raciaux de l’époque. Ici, pas de doute, les éléments de contexte sont nécessaires. (Je vous conseille ce livre !)
Mais si ce n’est pas le thème de votre roman, faut-il préciser l’année, la situation politique, sociale ou sanitaire ?
Je comprends que ça peut sembler superflu, ou même aller à l’encontre d’une volonté d’être un divertissement ou justement une échappatoire de la réalité. Et si votre thème est la vengeance, par exemple, ou les familles dysfonctionnelles, il peut très bien être traité hors de tout contexte.
2. Le genre du roman, un autre indice sur la manière de traiter le contexte ?
Le contexte socio-politique est un élément essentiel si vous écrivez dans certains genres, comme la fiction historique ou la critique sociale, par exemple.
Mais ce n’est pas forcément le cas pour d’autres genres.
Par exemple, dans une romance, l’intérêt ce sont les émotions des personnages et l’évolution de leur relation. Dans un roman policier, le but est le suspense et la résolution du mystère. Dans un roman feel good, l’objectif est l’atmosphère cosy et la légèreté. Alors il est tentant de créer une histoire hors des tourbillons du monde réel.
Alors peut-on juste faire comme si les personnages n’étaient jamais touchés de près (par leurs proches ou leur identité) ou de loin (par la télévision ou les réseaux sociaux) par ce qu’il se passe autour d’eux ?
Enfin, est-ce utile de mentionner des éléments de l’actualité juste pour « décorer », quand ce n’est utile ni au développement du personnage, ni à celui de l’intrigue ?
3. Ma conclusion
Comme vous avez pu le constater, j’ai plus de questions que de réponses sur le sujet !
Une chose dont je suis sûre, c’est qu’à part dans les genres de l’Imaginaire, on ne peut pas écrire de l’intemporel. Malgré nous, nous sommes les produits de notre époque et un lecteur, dans quelques années, verra de manière évidente que votre histoire se passe à un certain moment, ne serait-ce que par les gadgets électroniques, les manières de communiquer ou le quotidien et les valeurs des personnages. Il le verra dans les descriptions que vous croyez neutres, par exemple ! Le risque est que les incohérences ne deviendront que plus évidentes avec le temps.
Alors voici où j’en suis de mes réflexions :
👉 D’abord, ne pas perdre le lecteur. L’objectif de base c’est que le lecteur ne se demande pas en permanence quand se passe l’histoire ou se dise que ce n’est pas possible parce que vous utilisez des détails contradictoires. Il est peu probable que votre personnage prenne l’avion de France en avril 2020 pour partir se faire bronzer ! Même si le lecteur ne sait pas trop quand se passe l’histoire, l’auteur, lui, doit le savoir pour éviter les incohérences qui gâcheraient la lecture.
👉 Ensuite, la question de la pertinence du contexte dans l’histoire est évidente. Est-ce que l’intrigue du personnage peut utiliser les événements du contexte socio-politique pour des rebondissements (un mouvement de grève devient un obstacle) ou bien au niveau symbolique, en faisant un parallèle entre l’objectif du personnage et un élément du contexte national (une lutte contre une situation de discrimination au travail qui fait écho à une loi discutée à l’Assemblée Nationale) ? Si oui, alors un travail sur le contexte est nécessaire. Le risque est de mentionner un événement de ce type une fois, au moment où il est utile à l’intrigue, sans le tisser en toile de fond de tout le roman. Cela crée ce que j’appelle un « ça tombe bien dis donc ! » 😅 (Pour éviter cela, lisez cet article !)
👉 Enfin, cela dépend de votre intention en tant qu’auteur. Si vous voulez écrire une histoire divertissante, dessiner le contexte n’est pas toujours nécessaire, sauf pour les raisons de clarté ou d’intrigues déjà mentionnées. Mais si vous voyez la littérature comme un témoignage de son époque pour les générations futures, ou bien comme une façon de partager votre propre perception du monde, alors plonger vos personnages dans un contexte précis vous permettra de faire cela. N’oubliez pas, ce qui vous parait normal et évident est une vision totalement incroyable pour une personne vivant à l’autre bout du monde ou pour un lecteur qui n’est pas encore né !