Erreur d’auteurs #3 : le syndrome de la telenovela
Vous pouvez écouter cet article !
Une erreur fréquente : le syndrome de la telenovela
Dans cette série d’articles, je voudrais partager avec vous les erreurs les plus fréquentes que je vois dans les romans dont je fais la bêta-lecture. En effet, écrire, ça s’apprend, et quand on est auteur débutant, on fait des erreurs, et certaines reviennent souvent. Ce sont celles que je veux partager avec vous !
Avec cette série, j’espère vous aider à comprendre de nouveaux concepts d’écriture créative, à regarder d’une autre manière votre histoire en cours et même, peut-être, à provoquer chez vous un de ces moments magiques qui vous font avancer.
Aujourd’hui, je vous parle du syndrome de la telenovela, qui, sous son nom rigolo, pose le problème de la structure de votre roman et de la construction de votre personnage principal.
1. L’impression à la lecture
Dans ce type d‘histoires, on ne s’ennuie pas ! Les rebondissements se succèdent, on ne sait pas trop où donner de la tête. Le personnage n’a pas le temps de souffler et tous les malheurs du monde lui tombent dessus. Il y a des conflits, de la tension et de l’action.
Alors, me direz-vous, où est le problème ? Bonne question ! En fait, même si les obstacles s’enchaînent, je peux m’arrêter de lire et ne pas avoir envie de rouvrir le livre ou de rallumer ma liseuse. Je ne suis pas captivée par ce qui arrive, je ne me demande pas vraiment ce qu’il va se passer ensuite. C’est un peu comme si je regardais le personnage se débattre de loin, mais je ne suis pas impliquée.
Pendant la lecture, il m’arrive de me dire « Oh non, qu’est-ce que c’est que ça encore ? » en levant les yeux au ciel. Souvent, la fin n’est pas satisfaisante et j’ai l’impression que le récit pourrait continuer sans problème si on demandait à l’auteur d’ajouter des chapitres. Exactement comme pour les telenovelas, qui montrent les péripéties sans fin et plus ou moins crédibles de la vie de personnages pendant des années.
2. La source du problème
Le plus souvent, le problème, c’est que les rebondissements et les obstacles viennent de l’extérieur. Ils surgissent, les uns après les autres, sans liens entre eux. Ce sont des coups du sort, comme si votre protagoniste était la personne la plus malchanceuse du monde.
Par exemple, votre personnage perd son travail car son entreprise fait faillite, puis sans aucun lien, sa copine le quitte, puis son père meurt d’une attaque et son chien se fait écraser.
C’est triste, et même si votre écriture est magnifique et que la souffrance du personnage est bien rendue, est-ce une histoire avec un début et une fin ?
Les problèmes de votre protagoniste ne sont pas causés par lui-même, par ses failles et ses tentatives de résoudre le problème initial ou d’atteindre son objectif. Il est là et il subit et il fait comme il peut. D’où cette impression que le sort s’acharne sur une personne lambda.
Le problème avec cela, c’est que le personnage ressort comme parfait. Il ne fait pas d’erreur, c’est juste une victime qui n’a rien fait de mal. Et ce n’est pas facile pour un lecteur de s’identifier à une personne sans faille. Et surtout, si un personnage n’a pas de faille et ne fait pas d’erreur, alors il ne va pas s’améliorer, ni apprendre. Or, on s’attache surtout à des personnages imparfaits qui font des erreurs, qui continuent d’avancer et de se battre pour devenir une meilleure version d’eux-mêmes. Des personnages qui se transforment entre le début et la fin de l’histoire.
3. Les pistes de solution
Deux règles peuvent vous aider à éviter le syndrome de la telenovela.
👉 D’abord, l’intensité des obstacles doit être croissante. C’est de pire en pire et votre personnage doit se montrer de plus en plus fort, de plus en plus intelligent, de plus en plus courageux pour s’en sortir. Si, après avoir tué un dragon, votre personnage doit écraser une araignée, il y a des chances que votre lecteur ne soit pas plus captivé que ça.
👉 Ensuite, à part le premier problème qui peut tomber du ciel ( c’est l’élément perturbateur, si vous vous souvenez de vos leçons à l’école primaire !), le reste des obstacles doit découler des tentatives du protagoniste pour atteindre son objectif et régler ce premier problème. Vous pouvez lister les obstacles qui empêchent votre protagoniste d’atteindre son objectif et vérifier qu’ils ont bien été déclenchés par votre personnage, ses failles intrinsèques et ses erreurs concrètes.
Par exemple, si votre protagoniste est un adolescent qui a tendance à fuir les conflits, c’est cette peur des conflits qui le conduira à ne pas avouer à sa mère qu’il est tombé en scooter, ce qui le conduira à cacher son scooter abîmé et à dire qu’on le lui a volé. Et c’est comme ça qu’il se retrouvera à mentir à des officiers de police, au lieu de seulement faire face à ses parents et à faire fonctionner l’assurance. Au contraire, si l’adolescent tombe en scooter, que le scooter est abîmé, qu’il rentre chez lui en disant que son scooter est abîmé et qu’à la maison sa petite sœur vient de se couper et que ses parents la conduisent à l’hôpital et qu’elle y meurt, puis que des cambrioleurs rentrent dans la maison le lendemain soir et volent la bouilloire et la télévision, il se passe des choses, mais on s’y intéresse moins. A mon avis, dans le premier cas, on commence à s’attacher au personnage, mais pas dans le second. Est-ce que c’est le cas pour vous aussi ?
En conclusion
Même si vous avez une imagination débordante et que les idées pour torturer votre personnage jaillissent à foison de votre cerveau, attention à garder une progression dans votre histoire et à lier les traits de caractères de votre personnage et les obstacles auxquels il est confronté. Cela vous assurera que votre lecteur soit impliqué dans l’expérience de votre protagoniste et ne veuille pas lâcher votre livre.