Erreur d’auteurs #2 : mal utiliser son vécu dans son roman
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Utiliser son vécu dans son roman, une bonne idée ?
Il y a plusieurs manières d’utiliser son vécu pour écrire un livre. On peut écrire ses mémoires ou une autobiographie, par exemple. Dans cet article, je ne parle pas de ces cas de figures. Je parle d’écrire de la fiction qui intègre des éléments autobiographiques de l’auteur, c’est-à-dire des personnages qu’il connait, des lieux qu’il a fréquentés et/ou des situations vécues.
De manière plus générale, dans cette nouvelle série d’articles, je voudrais partager avec vous les erreurs les plus fréquentes que je vois dans les romans dont je fais la bêta-lecture. En effet, écrire, ça s’apprend, et quand on est auteur débutant, on fait des erreurs, et certaines reviennent souvent. Ce sont celles que je veux partager avec vous !
Avec cette série, j’espère vous aider à comprendre de nouveaux concepts d’écriture créative, à regarder d’une autre manière votre histoire en cours et même, peut-être, à provoquer chez vous un de ces moments magiques qui vous font avancer !
1. L’impression à la lecture d’une mauvaise utilisation du vécu dans un roman
A la lecture, on réfléchit beaucoup. On essaie d’imprimer dans notre mémoire tous ces moments, tous ces détails et tous ces personnages. On essaie de comprendre pourquoi l’auteur nous montre tout cela, où il veut en venir et quels sont les liens.
Souvent, il y a beaucoup de flash-backs ou de récits de souvenirs dans des dialogues. Notre cerveau de lecteur chauffe parce que tout a l’air important, il y a des détails très spécifiques sur les lieux, les personnages principaux, mais aussi sur les personnages secondaires, voire sur des figurants. D’ailleurs, on a du mal à savoir si les personnages secondaires le sont vraiment, tant on a d’informations biographiques sur eux. A la lecture, j’ai l’impression que tous les personnages sont principaux, je ne sais pas trop à qui m’attacher.
En lisant, on attend le moment où toutes ces informations trouveront leur utilité dans l’histoire, où tout s’assemblera et aura du sens. Et on peut perdre patience, car, souvent ce moment ne vient pas. On engrange des informations pour rien.
On a l’impression de se perdre dans l’univers du roman, dans la vie quotidienne, comme si on visitait l’endroit, comme une flânerie sans but et pas une histoire avec un début, une fin et un fil conducteur entre les deux.
2. La source du problème
Il me semble que ce problème peut avoir deux sources :
👉 D’abord, l’envie de l’auteur d’intégrer à son roman des éléments réels de sa vie, une anecdote, des lignes de dialogue, des détails d’un lieu insolite ou une expérience marquante. Mais ces éléments sont intégrés de force un peu comme une pièce de puzzle que l’on veut placer à tout prix. Et l’auteur a du mal à se séparer de ces scènes ou de ces détails.
👉 La seconde source peut être un projet pas très clair au début et une écriture au feeling, en flux libre. Dans ce cas, s’il n’y a pas de réécriture ensuite pour canaliser et trier tous les éléments de l’histoire, l’impression à la lecture est celle décrite plus haut. Les éléments réels s’imposent alors d’eux-même et les digressions s’accumulent. L’auteur s’amuse, mais le lecteur ne comprend pas où il veut en venir.
3. Les pistes de solution
Utiliser son vécu dans son roman, c’est non seulement souvent inévitable (de manière consciente ou non), mais c’est aussi une bonne chose ! Alors je vous donne trois conseils pour utiliser votre vécu dans votre roman d’une manière intéressante pour vos lecteurs.
👉 Réfléchissez bien au genre du livre que vous projetez d’écrire. Souhaitez-vous écrire une autobiographie, un recueil d’anecdotes marquantes de votre vie ou de la fiction ? A qui est destinée votre histoire ? Si les lecteurs ciblés lisent votre autobiographie et sont conscients dès le début de son genre, alors les nombreux détails et les digressions sont appréciés et à leur place, car l’objet de la lecture est justement de découvrir des moments de la vie de l’auteur. Par contre, si vous écrivez de la fiction, les éléments autobiographiques ne sont à leur place que s’ils servent l’histoire.
👉 Pour chaque scène, à la relecture, demandez-vous si elle a au moins une de ces fonctions : faire avancer l’intrigue, développer un personnage en montrant une nouvelle facette de sa personnalité ou montrer un nouvel élément utile de l’univers narratif. Si votre scène ne fait rien de tout ça, alors demandez-vous pourquoi elle est là : serait-ce parce qu’elle contient un souvenir personnel ? Comment pouvez-vous faire en sorte que votre scène ait au moins une de ces fonctions dans votre histoire ?
👉 Enfin, travaillez votre roman (en amont ou même en cours d’écriture) en rédigeant des bibles-personnages ou une description de votre univers narratif pour poser sur le papier les bases des éléments autobiographiques que vous souhaitez utiliser (traits de personnalités, lieux, milieux professionnels, etc…) pour pouvoir ensuite les transformer en fiction et les saupoudrer dans votre roman. Ainsi, votre vécu s’intègre dans votre histoire volontairement, il ne s’y glisse pas par mégarde !
En conclusion
Votre vécu peut être un matériau génial pour écrire votre roman. Mais pas n’importe comment ! Si vous voulez écrire de la fiction pour le grand public (et pas une autobiographie pour vos proches), alors il vous faut prendre du recul, trier et choisir les éléments qui servent votre histoire. Ce travail peut se faire avant de vous lancer dans l’écriture, ou bien après le premier brouillon, dans la phase de réécriture. Cela permettra à vos lecteurs d’avoir une expérience de lecture authentique, mais pas confuse.