Dix conseils d’écriture pour créer un antagoniste
Sur le site How to Write Shop, Lori Devoti et une dizaine d’auteurs partagent des conseils sur l’écriture et la publication de romans. J’ai choisi de traduire l’article Ten Writing Tips for Creating an Antagonist de Kathy Steffen qui, une fois n’est pas coutume, nous aide à penser notre histoire du point de vue de l’antagoniste. Elle nous rappelle que l’antagoniste n’a pas forcément à être un grand méchant, et surtout qu’il doit être construit et travaillé pour faire ressortir le meilleur de notre protagoniste.
Merci à Lori Devoti et Kathy Steffen d’avoir autorisé cette traduction !
Même si vous êtes ici pour des conseils d’écriture pour créer un antagoniste, peut-être que vous pensez toujours que votre protagoniste est la part la plus importante de votre livre. Pensez-y encore. Votre histoire vaut seulement autant que ce que vaut votre antagoniste – le personnage qui fait obstacle à votre protagoniste et ses objectifs. L’antagoniste est le moteur de l’histoire. Il faut qu’il soit aussi intéressant et aussi approfondi que votre héros, mais trop souvent, on écrit des antagonistes plats et prévisibles.
Quels conseils d’écriture pour créer un antagoniste ? Comment développer un antagoniste intéressant, divertissant, un personnage qui nous fasse frissonner, qui nous secoue, et qui provoque chez nous un peu plus que juste de la haine ? Comment fait-on pour que nos lecteurs soient presque de son côté ? Pour le rendre tellement complexe et équilibré que le lecteur puisse se connecter à lui et le croire aussi réel que les autres personnages de l’histoire ?
Voici dix conseils d’écriture créative pour développer des antagonistes à la hauteur de votre protagoniste et de votre histoire :
Conseil #1
Consacrez autant de temps et d’effort au développement de votre antagoniste qu’à celui de votre protagoniste. Développer autant son histoire. Connaissez-le par cœur. Donnez-lui une vie avant qu’il n’apparaisse dans votre livre.
Conseil #2
Assurez-vous que votre antagoniste (comme votre protagoniste) ait un objectif. Il croit qu’il est sur le seul chemin possible et que son but est noble. C’est le héros de sa propre histoire et il veut quelque chose. Il a réfléchi, il l’a bien considéré et il a décidé de tout faire pour l’obtenir. De préférence, c’est l’opposé de ce que veut votre protagoniste, ou peut-être qu’il veut la même chose et qu’il doit donc affronter votre protagoniste pour l’obtenir. Les objectifs sont clés à la fois pour le protagoniste et pour l’antagoniste. Faites-en sorte qu’ils provoquent un conflit !
Conseil #3
Ecrivez du point de vue de votre antagoniste, même si ce point de vue n’apparaît jamais dans votre livre. Ecrivez avec sa voix – à la première personne – comme s’il vous parlait. Laissez-le vous dire comment il se sent, ce qu’il veut, ce qu’il prépare. Vous établirez un lien intime que vos lecteurs sentiront, que ces lignes finissent ou non dans votre manuscrit.
Conseil #4
Assurez-vous que votre antagoniste – au moins dans son esprit – ait une raison de faire tout ce qu’il fait. Il doit croire qu’il est dans le vrai, sinon, votre lecteur n’aura pas l’impression qu’il est réel et décrochera. Pour le rendre crédible, n’oubliez pas qu’il doit croire en lui et en chaque décision qu’il prend.
Conseil #5
Comme Donald Maass le suggère dans Writing the Breakout Novel Workbook, travaillez sur la structure de votre livre aussi du point de vue de votre antagoniste. Pas pour chaque scène, mais donnez-lui une structure avec des étapes au sein de l’histoire pour que vous puissiez clairement voir son parcours dans votre livre. Que vous le fassiez avant, pendant ou après avoir écrit votre livre, c’est une excellente façon de renforcer le conflit dans votre histoire.
Toujours avec moi ? Nous en sommes au milieu de nos conseils d’écriture pour développer des antagonistes.
Conseil #6
En parlant de prévoir des étapes, pensez aussi à ce que traverse votre antagoniste émotionnellement. Donnez-lui une évolution. Si votre antagoniste change au cours de l’histoire, les lecteurs lui mangeront dans la main. Draco Malfoy de la série Harry Potter en est un excellent exemple. On le voit grandir tout au long des tomes, quelques fois dans le mauvais sens, d’autres fois dans le bon sens. Les lecteurs veulent s’immerger dans l’univers de votre histoire à travers votre protagoniste, mais donnez-leur une expérience pleine d’émotions du côté de votre antagoniste également et ils se sentiront impliqués et intéressés par votre histoire.
Conseil #7
Souvenez-vous que votre antagoniste n’a pas à être un méchant. Dans Light on Snow d’Anita Shreve, la protagoniste, Nicky, est une pré-adolescente qui a subi une terrible tragédie (elle a perdu sa mère et sa petite sœur dans un accident de voiture) et tout ce qu’elle veut, c’est une vie normale. Elle partage sa vie (et le drame) avec son père qui l’éloigne de tout ce qu’elle connait et les installe loin de toute civilisation. Il a le même objectif que sa fille – lui donner une vie aussi normale que possible – mais à cause de sa propre souffrance, il n’arrive pas à voir clairement comment donner à Nicky ce dont elle a désespérément besoin. Non seulement, c’est un antagoniste que nous pouvons comprendre, mais notre cœur souffre pour lui autant que pour Nicky.
Conseil #8
Décrivez le risque émotionnel créé par les actions de votre antagoniste. Faite ressentir à votre lecteur les répercussions sur votre protagoniste. Bertrand de Sarah’s Key est un mari qui est à un point de sa vie où il ne veut pas d’enfants. Il y a des secrets dans sa famille qu’il ne préfère pas faire ressortir. Lui et sa femme Julia marchent sur des œufs depuis le début de leur mariage et quand elle commence à se renseigner sur des événements liés à la rafle du Vel d’Hiv, les choses vont basculer. Est-ce que Bertrand est égocentrique ? Bien sûr. Mauvais ? Pas du tout. On comprend bien le dilemme de Julia et on est immédiatement intéressé.
Conseil #9
Si votre antagoniste est le mal absolu, rendez-le charmant ou drôle. Hannibal Lecter du Silence des Agneaux est fascinant : pendant les scènes où il aide Clarice, le lecteur souhaite qu’il ne soit pas un cannibale meurtrier et psychopathe. Il est tellement agréable qu’on aimerait partager une conversation et un dîner avec lui. Tant qu’on n’en est pas le plat principal. C’est un personnage tellement divertissant et aimé qu’il a eu droit à son propre livre.
Conseil #10
Si votre antagoniste est un grand enjeu de société, donnez-lui le nom et le visage d’un personnage. Construisez un personnage qui incarne tous les aspects de cette question sociale. Le racisme du début des années soixante devient Hilly Holbrook dans The Help. L’abus de pouvoir politique est illustré par le président Snow dans The Hunger Games (en fait, plusieurs personnages secondaires dans ce livre incarnent différents aspects négatifs de la société). Les lecteurs adorent avoir un personnage à détester, alors donnez-leur ce qu’ils veulent !
En appliquant ces dix conseils pour créer des antagonistes, votre antagoniste sera aussi fascinant, complexe et irrésistible que votre protagoniste, et vous serez bien parti pour écrire un bon livre !
Sur l’auteur
Kathy Steffen est une romancière primée. Elle enseigne l’écriture de fiction et intervient dans des programmes d’écriture aux Etats-Unis. Kathy a également publié des nouvelles et elle écrit une colonne mensuelle sur l’écriture. Ses livres, First There is a River, Jasper Mountain et Theater of Illusion sont disponibles en anglais. Pour en savoir plus, allez visiter son site www.kathysteffen.com !